samedi 3 novembre 2007

Ma fleur du mal

Impressionnée de moi-même pour avoir reconnu sur le blog de Tirui une citation d'un poème de Baudelaire, reconnue ensuite comme cette fameuse phrase répétitive de "L'invitation au voyage" :

Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté.

je me suis replongée dans les fleurs du mal pour en extraire l'un de mes poèmes favoris...avant de le retranscrire j'aimerai juste dire qu'il est assez ignoble et un tantinet romantique ! (Si si romantique...)
Ce qui me plait chez Baudelaire c'est la finesse avec laquelle il maitrisait la langue française et il avait en conséquence l'art de décrire avec poésie les choses les plus dégueulasses...sur ce je vous laisse savourer "une charogne" :

Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,
Ce beau matin d'été si doux :
Au détour d'un sentier une charogne infâme
Sur un lit semé de cailloux,

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,
Brulante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons.

Le soleil rayonnait sur cette pourriture,
Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;

Et le ciel regardait la carcasse superbe
Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.

Tout cela descendait, montait comme une vague,
Ou s'élançait en pétillant ;
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.

Et ce monde rendait une étrange musique,
Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,
Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.

Derrière les rochers une chienne inquiète
Nous regardait d'un oeil fâché,
Épiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.

Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
A cette horrible infection,
Étoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous, mon ange et ma passion !

Oui ! telle vous serez, ô reine des grâces,
Après les derniers sacrements,
Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses.
Moisir parmi les ossements.

Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine
Qui vous mangera de baisers,
Que j'ai gardé la forme et l'essence divine
De mes amours décomposés !


5 commentaires:

  1. je crois qu'un jour il faudra que je me penche sur le pourquoi je suis totalement hermétique à la poésie... surtout pour une fille qui a passé un bac litteraire...

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  2. Je ne connaissais pas ce poème... Il est plutôt pas mal...

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  3. c'est joliment dit mais comme déclaration d'amour à sa belle je sais pas si c'est un super bon plan :-D

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